top of page
Stéphan Le Doaré

Le Lobbying pour les nuls



À l'occasion d'une sortie en haute montagne il y a quelques années, je me suis intéressé aux différents vêtements qui composeraient ma "garde-robe" si particulière des alpinistes, à savoir des produits efficaces, légers et ... chauds. Car quand vous commencez un glacier balayé par les vents à trois heures du matin, éclairé à la frontale, vous ne trouvez pas de Décathlon à proximité ! (petite vidéo de notre ascension du "grand Paradis", sommet italien, ici ).

Bien des années auparavant, j'avais déjà eu l'occasion de me retrouver dans des situations de grand froid lorsque j'étais militaire. Mais une question me taraudait avant ce voyage : étais-je devenu frileux ? C'est vrai que j'avais déménagé dans le Sud et qu'il faut bien le dire, le temps est franchement différent de l'humidité parisienne. Mais cela expliquait-il vraiment ce changement dans mon corps ou était-ce autre chose. C'est à cette époque que j'ai découvert l'étonnant pouvoir de la laine. Une fibre aux propriétés jamais égalées, capable de se torsader ou de se tendre, un peu comme un cheveu qui boucle lorsqu'il est mouillé et qui se tend lorsqu'on le sèche. Cette propriété d'absorption ou d'expulsion de la chaleur se comprend bien avec l'exemple du sèche-cheveux. Si on sèche, on envoie de la chaleur qui va expulser une liaison hydrogène (responsable de la boucle). Bref, sans aller plus loin dans les détails techniques, la laine est un super-matériau idéal lorsqu'on transpire beaucoup. C'est un tissu qui continue à garder au chaud, même mouillé.

Par ailleurs, antibactérien, anti-odeur, on ne sent pas le fauve lorsqu'on arrive le soir au refuge, contrairement aux équipements acryliques ou autres. Et puis s'il faut vraiment enlever les odeurs, il suffit de laisser la laine au soleil une demi-journée et les UV font le travail. La laine est de nouveau propre, sans odeur. Génial !

Ce fut comme une révélation. J'avais bien des pulls en laine à l'armée, et n'avais pas froid non plus : je n'étais pas devenu frileux, juste mal habillé ! Que s'était-il alors passé depuis ? Je m'étais fait avoir par le lobby des tissus issus du pétrole. Les grandes enseignes proposent des produits à bas coût dans des rayonnages techniques, qui sont surement intéressants pour certains sports, mais qui ne tiennent pas la route en situation extrême.



L'argument qui a longtemps prévalu est que la laine gratte : les vêtements d'aujourd'hui sont bien plus doux et soyeux. Mais franchement, quand on a froid, je vous garantis que le soyeux du vêtement, on n'y pense plus trop ! Depuis quelques années, on assiste à un "revival" de la laine grâce aux progrès réalisés dans la filature et le type de maille utilisé dans la fabrication des tissus, porté par des entreprises innovantes, situées notamment en Australie, premier producteur mondial de laine Merinos (le mouton Merinos étant originaire d'Espagne). Des sociétés ont compris qu'il y avait un marché et se sont affairées à proposer des produits de plus en plus aboutis et nombreux, ce qui a permis de faire descendre un peu le prix des produits à base de laine, ce qui est une excellente chose.

Cette petite histoire montre à quel point un lobby peut influencer une population à choisir ses produits, même s'ils sont moins performants. Que celui qui n'a pas un jour acheté un vêtement Décathlon me jette la première pierre ...

Je me suis donc fait avoir sur les vêtements, ce qui a eu le mérite de m'éveiller face au monde industriel. Tout est bon pour faire du chiffre d'affaires. Tous les moyens sont mis en oeuvre à partir du moment ou le commercial doit vendre la solution, même si celle-ci n'est pas adaptée.


Aujourd'hui, les enjeux écologiques font naitre ou se redévelopper de nouvelles entreprises qui voient dans ce changement de vision une opportunité. Tout ce qui est "green" se vend ! De puissants lobbys siègent à Bruxelles et expliquent à des politiques avides de contenter leurs électeurs que le bilan carbone sera sauvé par des éoliennes et des panneaux solaires. C'est une évidence, mais les clients de l'industriel sont les électeurs du politique. Les lois d'incitation rassasient un peuple votant, téléguidé par le marketing de vente des entreprises.



Et donc, bien que l'énergie provenant du nucléaire ne dégage que 6g de Co2 par Kwh, on construit des centrales à gaz (420g de CO2 par Kwh). On nous propose de l'éolien et du solaire (dont le calcul du bilan carbone se révèle pire que le nucléaire lorsqu'on le regarde "en production réelle"), alternative impossible lorsqu'il faut lisser la consommation électrique (l'électricité ne se stockant pas, il faut compléter le flux constant d'énergie issue du nucléaire par une énergie "à la demande" avec des usines à charbon, ce que ne peux pas faire l'éolien (on ne maitrise pas le vent) ou le solaire (on ne maitrise pas plus le soleil et les nuages !))...

Chacun s'intéresse à ses achats. Avoir un pull chaud en haute montagne est important. Ne pas se faire avoir par un lobby ou par un marketing est tout aussi important dans la "green-tech". Utiliser les bonnes ressources en matière de bilan carbone, tout le monde ne semble pas s'y intéresser autant.


Pour reprendre le gimmick d'un youtuber connu : "tout le monde s'en fout ?"


Stéphan Le Doaré

@stephanledoare

151 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page